Modification du territoire communal

Toute modification affectant le territoire communal doit être opérée selon la procédure établie par les articles L. 2112-2 à L. 2112-13 du CGCT.

Conformément à l’article L. 2112-2 du CGCT, les modifications aux limites territoriales des communes et le transfert de leurs chefs chefs-lieux sont décidés après enquête dans les communes intéressées sur le projet lui-même et ses conditions.

Le préfet prescrit cette enquête lorsqu’il a été saisi d’une demande à cet effet soit par le conseil municipal, soit par le tiers des électeurs inscrits de la commune ou de la portion de territoire en question, ou il peut l’ordonner d’office.

Le préfet est libre d’apprécier l’opportunité de poursuivre ou non la procédure en acceptant ou refusant de prescrire l’enquête sous réserve de ne pas commettre d’erreur manifeste d’appréciation, laquelle donne lieu à un contrôle restreint du juge administratif. Pour ce faire, il doit se fonder sur la pertinence des arguments soulevés par les pétitionnaires.

C’est en ce sens que s’est prononcée la Cour administrative d’appel de Lyon, dans un arrêt « Commune de Landry », rendu le 1er mars 2001* . Après avoir relevé que la commune demanderesse invoquait des arguments historiques, des circonstances géographiques tenant à la configuration naturelle des lieux, des arguments économiques et financiers tenant au fait que la commune demanderesse avait réalisé à ses frais sur ce territoire des équipements et des investissements importants, enfin la nécessité d’une gestion cohérente du site, la Cour a jugé que « ces différents éléments, qui n’apparaissent pas en l’espèce, comme dénués de toute pertinence, sont au nombre de ceux qui peuvent être pris en considération pour apprécier l’intérêt d’une modification aux limites territoriales communales ».

Sous cette réserve, le préfet apprécie la régularité formelle de la demande dès qu’il en est saisi. En l’occurrence, le préfet doit contrôler la validité des pétitions des électeurs concernés. A cette fin, il doit vérifier d’une part que le nombre de pétitionnaires correspond au moins au tiers des électeurs inscrits habitant sur la portion du territoire indiquée dans la demande, d’autre part il doit s’assurer de l’effectivité des signatures.

Lorsque la régularité de la demande est établie, deux éléments sont à prendre en compte. D’une part, la modification des limites du territoire communal est une affaire d’opportunité : il n’existe pas un droit à la modification du territoire, pas plus qu’un droit au maintien de ses limites existantes. D’autre part, le préfet est entièrement libre d’apprécier sur le fond la demande de modification et refuser de mettre en œuvre la procédure si la modification ne présente pas un intérêt réel, à la condition de ne pas commettre une erreur manifeste d’appréciation.

La demande de rattachement peut porter sur toute portion de territoire limitrophe à la commune de rattachement ; il peut aussi bien s’agir d’une section de commune, que d’une portion de territoire constituant un centre « d’intérêts distincts » et comportant en propre des habitants, ou d’une parcelle de territoire.

Dans l’hypothèse où il déciderait de donner suite à la demande des électeurs de la portion de territoire souhaitant faire sécession, le préfet doit prescrire l’enquête publique et d’instituer par arrêté la commission prévue à l’article L. 2112-3 alinéa 1 du CGCT.



Aucune disposition législative ou réglementaire ne fixe de délai entre la demande de détachement et la création de la commission. Le Conseil d’Etat, dans son arrêt du 18 mars 1994 « Commune d’Aigueblanche », a considéré, alors qu’une demande de détachement avait été formulée en juin 1983, que le préfet avait pu valablement n’instituer la commission qu’en mars 1987, dès lors qu’il avait été établi qu’aucun changement dans les circonstances qui ont conduit les électeurs à faire leur demande n’était intervenu.

Après accomplissement de ces formalités (avis du commissaire-enquêteur et avis de la commission syndicale), les conseils municipaux donnent obligatoirement leur avis. Par ailleurs, tout projet de modification des limites territoriales des communes est soumis à l’avis du conseil général :

- lorsque le projet tend à modifier les limites cantonales ;

- à défaut d’accord des conseils municipaux et des commissions syndicales intéressés sur les changements proposés.

A l’issue de la procédure, le préfet prend sa décision en toute liberté d’appréciation : e fait de prendre ou de ne pas prendre la décision de modification, de même que le contenu de cette décision, relève de la seule compétence discrétionnaire du préfet qui en apprécie l’opportunité.

L’arrêté du préfet portant modification est publié au recueil des actes administratifs de la préfecture. Toutefois, un décret en Conseil d’Etat, sur la proposition du ministre de l’intérieur, est requis lorsque la modification territoriale projetée a pour effet de porter atteinte aux limites cantonales.

* CAA Lyon, 21 mars 2001, Commune de Landry, RFDA 2001, p. 1366