Les procédures de transfert de gestion amiable et autoritaire sont définies, pour l’ensemble des personnes publiques, aux articles L. 2123-3 à L. 2123-6 du CG3P.
Le transfert de gestion est une procédure qui permet aux personnes publiques de modifier, entre elles, l'utilisation d'un immeuble relevant du domaine public lorsque cet immeuble change d'affectation tout en continuant à relever du domaine public sous la main du nouvel affectataire.
Cette procédure n'entraîne pas de transfert de propriété de l'immeuble au bénéfice de celle à laquelle la gestion de l'immeuble est temporairement transférée.
Les articles R. 2123-9 à R. 2123-14 du CG3P fixent les modalités de mise en œuvre de ces procédures.
Transfert de gestion amiable
Dispositions applicables à l’État et à ses établissements publics
L’article R. 2123-9 du CG3P désigne les autorités compétentes pour prendre la décision d’opérer un transfert de gestion.
Cet article s’applique exclusivement à l’État et à ses établissements publics.
Désignation des autorités compétentes pour prendre la décision de transfert de gestion
Le transfert de gestion d’un immeuble dépendant du domaine public de l’État est décidé par le préfet (ou le gestionnaire du domaine public de l’État compétent agissant par délégation du préfet).
Toutefois, cette compétence relève de l’autorité militaire lorsqu’il s’agit de transférer la gestion d’un immeuble dépendant du domaine public militaire.
Dans ces deux cas, la décision de transfert de gestion est prise après avis du directeur départemental des finances publiques. Cet avis simple porte sur les conditions juridiques de l’opération. Le directeur départemental des finances publiques fixe en outre les conditions financières en application de ses compétences propres en matière financières (cf. infra).
Par ailleurs, la décision de transférer la gestion d’un immeuble dépendant du domaine public propre d’un établissement public de l’État relève de l’autorité compétente de l’établissement public désignée par son statut. Dans le silence de ce dernier, la décision relève de l’organe délibérant.
Recours facultatif à une convention de transfert de gestion
L’article R. 2123-9 prévoit la possibilité de passer une convention qui fixe les règles de gestion applicables ainsi que les modalités techniques et financières de l’opération.
Cette convention contient a minima :
- la durée prévisionnelle du transfert de gestion, même si cela ne constitue pas une obligation en vertu de l'article susvisé, la fixation d’une durée dans la convention est fortement recommandée ; il n’existe pas, compte tenu de la nature même de la procédure de transfert de gestion, de durée maximale fixée au plan législatif et règlementaire. La durée doit être fixée en fonction de la durée prévisible de l’affectation du bien au domaine public de la personne publique bénéficiaire. En cas d’incertitude, la fixation d’une durée de l’ordre d’une dizaine d’années peut être envisagée sachant qu’au terme du transfert de gestion, celui-ci pourra être renouvelé, avec accord du propriétaire, si les circonstances le justifient.
- ses modalités financières et techniques ;
- les modalités selon lesquelles le retour de l’immeuble à la personne publique propriétaire est constaté en fin de gestion.
Les éventuels désaccords, autres que financiers, préalables à la signature du transfert de gestion, sont réglés, au sein de l’État, au plan départemental par le préfet et, en cas de difficulté persistante, au niveau interministériel. Si le désaccord est d’ordre financier et n’a pas pu faire l’objet d’un règlement au plan départemental, le dossier fera l’objet d’une saisine de la Direction de l’immobilier de l’État.
Conditions financières du transfert de gestion
Le transfert de gestion ne donne pas lieu au versement d’un prix de transfert (ou de dépossession) dans la mesure où il n’y a pas perte du droit de propriété mais uniquement perte temporaire de l’usage du bien.
La procédure de transfert de gestion donne lieu à indemnisation, fixée par le directeur départemental des finances publiques, à raison des dépenses ou de la privation de revenus qui peuvent en résulter pour la personne dessaisie.
L’indemnisation doit alors dans cette situation prendre en compte les conséquences de la perte de jouissance de l'immeuble pour son propriétaire (privation de revenus en particulier) ou de dépenses déjà engagées et non amorties sur le bien objet du transfert de gestion, ou bien encore de dépenses à engager obligatoirement qui seraient la conséquence directe du transfert de gestion contraignant le propriétaire à reconstituer une installation identique sur un autre site.
Le montant de l'indemnisation doit donc être calculé à hauteur du préjudice réellement subi par le propriétaire qui se dessaisit de l’immeuble.
Dispositions applicables aux collectivités territoriales
La décision d’opérer le transfert de gestion d’un immeuble dépendant du domaine public d’une collectivité territoriale, d’un groupement de collectivités territoriales ou d’un de leurs établissements publics est prise par délibération de l’organe délibérant concerné.
Dans cette hypothèse, le directeur départemental des finances publiques n’intervient pas dans la fixation du montant de l’indemnité due, le cas échéant, aux collectivités territoriales, à leurs groupements ou à leurs établissements publics.
Dispositions communes à l’État, aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics
La fin de l’affectation puis le retour de l’immeuble à la personne publique propriétaire sont constatés de façon contradictoire par les représentants des personnes publiques intéressées, les modalités pratiques de ce constat sont laissées à leur libre appréciation.
L’immeuble fait retour gratuitement à la personne publique propriétaire qui retrouve l’intégralité de ses pouvoirs de gestion sur l’immeuble ainsi que les obligations et responsabilités qui y sont attachées.
Le propriétaire public conserve la faculté de mettre un terme, à tout moment et de manière anticipée, au transfert de gestion. Il peut le faire en modifiant l'affectation de l'immeuble transféré. Mais, dans cette hypothèse, le bénéficiaire du transfert peut, sauf disposition contraire dans l'acte, prétendre à une indemnité égale au montant des dépenses exposées pour les équipements réalisés, déduction faite le cas échéant de l'amortissement pratiqué et des frais de remise en état acquittés par le propriétaire du domaine public.
Droits et obligations
Le CG3P n'affecte pas les droits et obligations qui incombent tant au bénéficiaire du transfert qu'à la personne publique propriétaire de la dépendance concernée.
La personne publique bénéficiaire :
- doit maintenir pendant toute la durée du transfert de gestion le caractère de domanialité publique attaché à la dépendance transférée ;
- jouit de l'immeuble conformément à sa destination ;
- assume toutes les responsabilités sur l’emprise transférée;
- accomplit tous les actes de gestion sur l’emprise transférée et peut si cela est justifié accorder dans les limites de la durée du transfert de gestion des autorisations d'occupation temporaires constitutives de droits réels, en application des articles R. 2122-12 et R. 2122-15, si l'acte de transfert l'autorise expressément à le faire.
- perçoit à ce titre les produits des redevances d'occupation et en assure le recouvrement.
La personne publique propriétaire :
- ne contrôle pas l'utilisation et la gestion par le bénéficiaire du bien transféré, mais s’assure que durant le transfert que le caractère de domanialité publique reste bien attaché à l’emprise ;
- dispose de la faculté de reprendre gratuitement le bien dès que le bénéficiaire met fin à l'affectation qui avait justifié le transfert de gestion.
Transfert de gestion pour un motif d’intérêt général
Les articles R. 2123-12 et R. 2123-13 du CG3P précisent les conditions de mise en œuvre de la procédure de transfert de gestion autoritaire ou forcée (ancienne théorie dite « des mutations domaniales »). Ils donnent à l’État la possibilité de procéder, dans certaines circonstances caractérisant un motif d’intérêt général, à un changement autoritaire de l’affectation de dépendances du domaine public appartenant à d’autres collectivités publiques.
Dans ce cadre, la compétence pour prononcer le changement autoritaire d’affectation d’une dépendance du domaine public d’une personne publique relève du préfet.
L’article L. 2123-4 subordonne la mise en œuvre du transfert de gestion autoritaire à la constatation du désaccord de la personne publique propriétaire.
Modalités de constatation du désaccord de la collectivité publique propriétaire
L’article R. 2123-12 organise la constatation du désaccord de la collectivité propriétaire à l’encontre du projet poursuivi. Cette procédure incombe au préfet.
La collectivité propriétaire doit être en mesure d’apprécier l’intérêt général du projet et de vérifier que la personne qui demande à bénéficier du transfert de gestion n’a pas ignoré ou renoncé à d’autres voies permettant d’atteindre sans inconvénients supérieurs le résultat souhaité.
À cette fin, le service intéressé de l’État adresse, sous couvert du préfet, un dossier de demande de transfert à la collectivité publique ou à l’établissement public propriétaire.
Cette demande précise l’objet, les motifs et les caractéristiques essentielles du transfert demandé.
Le dossier énumère les procédures préalablement engagées par le service ou la collectivité intéressée pour parvenir à la réalisation de son projet.
La collectivité ou l’établissement public dispose d’un délai de 4 mois pour délibérer sur le bien-fondé de la demande. Cette demande est réputée avoir été rejetée en l’absence de réponse du propriétaire du domaine public dans
ce délai.
Désignation de l’autorité compétente pour prendre la décision de transfert de gestion
À défaut d’accord de la collectivité publique propriétaire (formalisé dans le délai de 4 mois ou non formalisé à l’expiration de ce délai), le transfert de gestion est prononcé par le préfet.
Conditions financières
A l’instar du transfert amiable, ce transfert de gestion autoritaire ne donne pas lieu au versement d’un prix de transfert (ou de dépossession) entre les personnes publiques.
Sur le fondement de l’article L. 2123-6 du CG3P, la collectivité dépossédée peut être indemnisée du préjudice subi en raison des dépenses ou privation de revenus résultant du transfert.
Transfert de gestion d’une dépendance du domaine public comprise dans le périmètre d’une DUP
Ce transfert de gestion est soumis à une procédure particulière dès lors qu’il concerne des dépendances du domaine public, appartenant à une personne publique autre que l’État, qui sont comprises dans le périmètre d’une déclaration d’utilité publique.
En application de l’article L. 132-3 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, le changement d’affectation de la dépendance au profit du bénéficiaire de la DUP est constaté par l’État au moyen de l’arrêté de cessibilité.
En cas de désaccord, les modalités de répartition des charges de gestion et l’indemnisation éventuellement due à la personne publique propriétaire sont fixés par le juge de l’expropriation (article L. 132-4 du Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique).