Les communes, leurs établissements publics et leurs groupements disposent d’un patrimoine destiné à leur permettre de remplir leurs missions.
Les biens qui composent ce patrimoine peuvent être incorporels (droits) ou corporels (objets matériels), immobiliers ou mobiliers.
Le régime juridique de ces biens varie selon qu’ils appartiennent soit au domaine privé communal et relèvent du droit civil, soit au domaine public de la commune et relèvent du droit administratif.
Les communes peuvent accroître leur patrimoine en faisant l’acquisition de biens mobiliers, immobiliers ou de droits. Ces acquisitions peuvent être réalisées soit à titre onéreux, selon des procédés de droit privé, soit à titre gratuit.
Biens relevant du domaine public
Consistance du domaine public
Les biens immobiliers des communes peuvent appartenir au domaine public immobilier général ou à des domaines publics spécifiques (maritime, fluvial, routier, aéroportuaire...) qui correspondent à des catégories de biens déterminés par la loi.
Le Code général de la propriété des personnes publiques (CG3P) confère un fondement législatif à la définition jurisprudentielle du domaine public immobilier. En application des dispositions de l’article L. 2111-1 du CG3P, font partie du domaine public les biens appartenant à une personne publique et qui sont :
- soit affectés à l’usage direct du public ;
- soit affectés à un service public pourvu qu’en ce cas ils fassent l’objet d’un aménagement indispensable à l’exécution des missions de ce service public.
Cette définition repose tout d’abord sur un critère permanent, à savoir celui de l’appartenance exclusive du bien à une personne publique. En effet, un bien appartenant à une commune et qui fait l’objet d’une copropriété avec des personnes privées ne peut être soumis au régime de la domanialité publique (CE, 11 février 1994, Cie d’assurance Préservatrice Foncière).
En outre, elle prévoit également deux critères alternatifs qui reposent sur l’affectation du bien, soit à l’usage direct du public, soit à un service public.
Dans le premier cas, il convient de ne pas confondre l’affectation à l’usage du public avec l’ouverture à l’usage du public. Ainsi, le fait qu’une plage ou une forêt soit ouverte au public ne suffit pas à la faire dépendre du domaine public.
Dans le deuxième cas, le critère de l’aménagement indispensable retenu pour l’affectation des biens au service public conduit à un resserrement du périmètre de la domanialité publique. Cet aménagement doit représenter un caractère indispensable pour l’exécution des missions de service public. Un simple aménagement spécial n’est pas suffisant (à titre d’exemple, de simples bureaux administratifs situés dans une annexe de la mairie pourront être considérés comme relevant du domaine privé de la commune). Les travaux relatifs à ces aménagements doivent être réalisés de façon certaine et effective, sans pour autant être nécessairement achevés. La jurisprudence du Conseil d’État a confirmé à plusieurs reprises que l’usage du critère de l’aménagement spécial continue à s'appliquer pour les situations nées antérieurement à l’entrée en vigueur du CG3P (CE, 3 octobre 2012, Commune de Port-Vendres, req. n° 353915 ; CE, 8 avril 2013, Association ATLALR, req. n° 363738 ; CE, 25 janvier 2017, Commune de Port-Vendres, req. n° 395314).
En ce qui concerne les domaines publics particuliers définis par la loi, le CG3P précise également la consistance, d’une part, du domaine public maritime et fluvial, en distinguant les biens relevant du domaine artificiel et du domaine naturel et, d’autre part, du domaine public aéronautique, routier et ferroviaire.
L’article L. 2112-1 du CG3P donne une définition du domaine public mobilier, non pas générale, mais au contraire orientée vers les biens mobiliers à vocation culturelle. Cette définition est principalement issue de l’article 14 de la loi du 31 décembre 1913 relative aux monuments historiques. Elle vise les biens présentant un intérêt public pour l’histoire, l’archéologie, la science ou la technique et établit corrélativement une liste non exhaustive de biens à l’image des archives publiques ou des collections de musées. Cette définition est principalement issue de l’article 14 de la loi du 31 décembre 1913 relative aux monuments historiques, désormais codifié aux articles L. 622-1 et L. 622-5 du Code du patrimoine.
Utilisation du domaine public
Les articles L. 2122-1 à 2122-4 du CG3P prévoient que nul ne peut occuper une dépendance du domaine public sans disposer d’un titre l’y autorisant, ni utiliser ce domaine en dépassant les limites du droit d’usage qui appartient à tous.
Caractéristiques de l’occupation ou de l’utilisation du domaine public
Cette occupation ou cette utilisation est temporaire, précaire et révocable (CE, 8 novembre 2019, n° 421491, Association Club seynois multisport).
Les autorisations d’occupation du domaine public peuvent toutefois être assorties de droits réels. Les communes et les autres collectivités territoriales peuvent ainsi conclure, sur leur domaine public, soit des baux emphytéotiques administratifs (BEA) dont le régime juridique est codifié au articles L. 1311-2 à L. 1311-4-1 du CGCT, soit des autorisations d’occupation temporaire (AOT) du domaine public constitutives de droits réels dont les modalités d’application sont régies par les articles L. 1311-5 à L. 1311-8 du CGCT.
De tels AOT ou baux ne peuvent cependant avoir pour objet l'exécution de travaux, la livraison de fournitures, la prestation de services ou la gestion d'une mission de service public avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d'exploitation, respectivement pour le compte des collectivités territoriales ou pour les besoins d'un acheteur soumis au Code de la commande publique, ou d'une autorité concédante soumise au Code de la commande publique. Dans le cas où une AOT ou un bail serait nécessaire à l'exécution d'un contrat de la commande publique, ce contrat doit prévoir les conditions de l'occupation du domaine.
Paiement d’une redevance
Les articles L. 2125-1 à L. 2125-6 du CG3P indiquent que l’occupation ou l’utilisation du domaine public donne lieu au paiement d’une redevance, sous réserve des exceptions prévues par la loi.
Ainsi, l’article L. 2125-1 du CG3P prévoit, lorsque l'occupation ou l'utilisation concerne l'installation par l'État des équipements visant à améliorer la sécurité routière ou nécessaires à la liquidation et au constat des irrégularités de paiement de toute taxe perçue au titre de l'usage du domaine public routier, qu’elle n’est pas soumise à redevance.
Il prévoit également que l'autorisation d'occupation ou d'utilisation du domaine public peut être délivrée gratuitement :
- soit lorsque l'occupation ou l'utilisation est la condition naturelle et forcée de l'exécution de travaux ou de la présence d'un ouvrage, intéressant un service public qui bénéficie gratuitement à tous ;
- soit lorsque l'occupation ou l'utilisation contribue directement à assurer la conservation du domaine public lui-même ;
- soit lorsque l'occupation ou l'utilisation contribue directement à assurer l'exercice des missions des services de l'État chargés de la paix, de la sécurité et l'ordre publics ou du contrôle aux frontières dans les aéroports, les ports et les gares ;
- soit lorsque l'occupation ou l'utilisation permet l'exécution de travaux relatifs à une infrastructure de transport public ferroviaire ou guidé.
En outre, l'autorisation d'occupation ou d'utilisation du domaine public peut être délivrée gratuitement aux associations à but non lucratif qui concourent à la satisfaction d'un intérêt général.
Lorsque l'occupation du domaine public est autorisée par un contrat de la commande publique ou qu'un titre d'occupation est nécessaire à l'exécution d'un tel contrat, les modalités de détermination du montant de la redevance mentionnée au premier alinéa de l'article L. 2125-1 précité sont fonction de l'économie générale du contrat. Lorsque ce contrat s'exécute au seul profit de la personne publique, l'autorisation peut être délivrée gratuitement.
Conformément à l'article L. 2125-1-1 du CG3P, et par dérogation à l'article L. 2125-1, l'organe délibérant de la commune peut décider par délibération de délivrer à titre gratuit les autorisations d'occupation temporaire du domaine public communal, lorsqu'elles sont sollicitées au bénéfice de personnes morales de droit public ou de personnes privées qui participent au développement de la nature en ville et répondent à un objectif d'intérêt public en installant et entretenant des dispositifs de végétalisation.
La délibération instaurant la gratuité précise les dispositifs de végétalisation pouvant bénéficier d'autorisations d'occupation temporaire, la durée pour laquelle les autorisations d'occupation temporaire sont délivrées et, le cas échéant, les règles à respecter en matière d'occupation du domaine.
L'autorisation d'occupation temporaire est accordée après instruction par la commune. Le caractère gratuit de l'autorisation est subordonné au fait que lesdites personnes ne poursuivent, à travers l'installation et l'entretien de dispositifs de végétalisation, aucun but lucratif.
Les dispositifs de végétalisation mentionnés au premier alinéa du présent article respectent les règles applicables au titre des Codes de l'urbanisme, de l'environnement et du patrimoine. Le cas échéant, ils sont soumis à autorisation dans les conditions prévues par le Code de l'urbanisme. Ils sont compatibles avec la destination et l'usage du domaine public.
Les redevances sont calculées et recouvrées en application des articles L. 2125-3 à L. 2125-5 et L. 2321-1 à L. 2323-14 du CG3P. Les redevances dues tiennent compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation.
Servitudes
À l’origine, les servitudes établies sur le domaine public devaient être préexistantes à l’incorporation du bien dans ce domaine. Dans son article L. 2122-4 , le CG3P a prévu une innovation majeure en permettant la constitution de servitudes sur le domaine public existant, à condition qu’elles soient compatibles avec l’affectation du bien qu’elles grèvent.
Modalités de gestion
On distingue le transfert de gestion entre personnes publiques et la modification d’affectation d’un bien par l’État.
S’agissant du transfert de gestion entre personnes publiques, les communes peuvent opérer, entre elles ou avec les autres personnes publiques, un transfert de gestion des immeubles dépendant de leur domaine public, en vue de permettre au bénéficiaire de ce transfert de gérer ces immeubles en fonction de leur affectation (article L. 2123-3 du CG3P). La commune demeure propriétaire du bien transféré et le récupère gratuitement dès qu’il n’est plus utilisé conformément à son affectation. De plus, la commune conserve la maîtrise de l’affectation de ce bien et peut mettre fin au transfert sous réserve du paiement d’une indemnité, à condition que la convention de transfert le prévoit et lorsque le transfert ne découle pas d’un arrêté de cessibilité pris dans le cadre d’une déclaration d’utilité publique.
En ce qui concerne la modification d’affectation d’un bien par l’État, le CG3P a codifié la jurisprudence relative à la théorie des mutations domaniales (article L. 2123-4 du CG3P). Cette procédure autorise l’État, en cas d’opposition de la commune et lorsqu’un motif d’intérêt général le justifie, à modifier l’affectation des dépendances du domaine public d’une commune pour la durée de la nouvelle affectation. Dans ce cas, la commune peut prétendre à l’octroi par l’État d’une indemnisation (article L. 2123-6 du CG3P).
Sortie du bien du domaine public
Lorsqu’un bien n’est plus affecté à un service public ou à l’usage direct du public, il ne relève plus du domaine public à compter de l’intervention de l’acte administratif constatant son déclassement (article L. 2141-1 du CG3P). Ainsi, la sortie d’un bien du domaine public communal est conditionnée, d’une part, par une désaffection matérielle du bien et, d’autre part, par une délibération de la commune constatant cette désaffectation et portant déclassement du bien.
A l'instar des biens relevant du domaine public artificiel de l'État, les biens du domaine public artificiel des collectivités territoriales, de leurs groupements et de leurs établissements publics affectés à un service public ou à l'usage direct du public peuvent faire l'objet d'un déclassement anticipé, alors même que les nécessités du service public ou de l'usage direct du public justifient que cette désaffectation ne prenne effet que dans un délai fixé par l'acte de déclassement (article L. 2141-2 du CG3P).
Biens relevant du domaine privé
Consistance du domaine privé
Le CG3P donne une définition a contrario du domaine privé des personnes publiques, à savoir que les biens n’appartenant pas au domaine public relèvent du domaine privé (article L. 2211-1 du CG3P).
De plus, quatre catégories de biens relèvent désormais de ce domaine par détermination de la loi : les réserves foncières, les biens immobiliers à usage de bureau qui ne forment pas un bien indivisible avec ceux relevant du domaine public, les chemins ruraux, et les bois et forêts soumis au régime forestier.
Utilisation du domaine privé
Les biens relevant du domaine privé communal sont gérés en application des règles du droit privé.
L’article L. 2241-1 du CGCT indique que le conseil municipal délibère sur la gestion des biens et les opérations immobilières effectuées par la commune.
L’article L. 2122-21 du CGCT précise que le maire est chargé d’exécuter les décisions du conseil municipal, notamment en matière de conservation et d’administration des propriétés de la commune et de passation des baux.