La procédure devant les Chambres régionales des comptes et les tribunaux administratifs et leurs conséquences

En l’absence de vote du budget primitif

À défaut d'adoption dans le délai imparti du budget primitif (article L.1612-2 du CGCT), ou à défaut de sa transmission dans le délai de 15 jours après la date limite de vote (article L.1612-8 du CGCT), le Préfet saisit sans délai la chambre régionale des comptes (CRC).

Il joint à cette saisine l'ensemble des informations et documents indispensables à l'établissement du budget, ainsi que les pièces établissant que ces informations et documents ont été communiqués à la collectivité ou à l'établissement public intéressé.

Par ailleurs, le représentant de l'État informe la collectivité ou l'établissement public intéressé de la saisine de la chambre régionale des comptes (article R.1612-17 du CGCT).

La CRC rend un avis. Elle formule des propositions pour le règlement du budget dans un délai d'un mois par avis public.

Le préfet règle, par arrêté, le budget primitif.

Il le rend exécutoire dans un délai de 20 jours à compter de la notification de l'avis de la CRC. S'il s'écarte des propositions de la chambre, il assortit sa décision d'une motivation explicite (article R. 1612-11 du CGCT).

Il doit motiver sa saisine, sous peine de voir celle-ci déclarée irrecevable pour défaut de motivation. Dans le cadre de son pouvoir de substitution, il doit tirer les conséquences budgétaires des actes de gestion intervenus après la saisine de la CRC.

Conséquences de la saisine de la CRC

Dès la saisine de la CRC, conformément à l'article L. 1612-2 du CGCT, les pouvoirs budgétaires de l'assemblée délibérante portant sur toute délibération budgétaire sont suspendus jusqu'au terme de la procédure, c’est-à-dire jusqu’au règlement du budget par le représentant de l’État.

La collectivité peut toutefois fonctionner puisqu’en application de l'article L. 1612-1 du CGCT l'ordonnateur local peut :

  • engager, liquider et mandater les dépenses de fonctionnement dans la limite de celles inscrites au budget de l'exercice précédent ;
  • liquider et mandater les dépenses à caractère pluriannuel incluses dans une autorisation d’engagement sur des exercices antérieurs dans la limite des crédits de paiement prévus au titre de l’exercice par la délibération d’ouverture d’autorisation d’engagement ;
  • mandater les dépenses afférentes au remboursement en capital des annuités de la dette venant à échéance avant le vote du budget ;
  • mettre en recouvrement les recettes de fonctionnement :
  •  S'agissant des dépenses d'investissement, l'article L.1612-1 prévoit que, jusqu'à l'adoption du budget ou jusqu'au 31 mars, en l'absence d'adoption du budget avant cette date, l'exécutif peut, sur autorisation de l’assemblée délibérante :
    • engager, liquider et mandater des dépenses d'investissement dans la limite du quart des crédits ouverts au budget de l'exercice précédent, non compris les crédits afférents au remboursement de la dette ;
    • liquider et mandater les dépenses à caractère pluriannuel incluses dans une autorisation de programme votée sur des exercices antérieurs, dans la limite des crédits de paiement prévus au titre de l'exercice par la délibération d'ouverture d'autorisation de programme.

En l’absence d’équilibre du budget

Le préfet saisit la CRC dans le délai de 30 jours à compter de la transmission du budget qui n'a pas été adopté en équilibre. Cette saisine prend la forme d’une lettre recommandée avec accusé de réception et doit viser expressément l’article L. 1612-5. Le préfet joint à sa saisine (article R. 1612-19 du CGCT) :

  • le budget voté ;
  • l’ensemble des informations et documents utilisés pour l’élaboration de celui-ci ;
  • les documents afférents à l’exercice précédent.

 Il informe la collectivité ou l’établissement public intéressé de la saisine de la chambre régionale des comptes. Le représentant de l’État doit également informer directement de cette saisine le comptable concerné.

En conséquence, dès réception de la lettre du préfet l’informant de la saisine de la chambre régionale des comptes, les services fiscaux peuvent bloquer l’émission des rôles généraux des impositions directes dans l’attente du règlement du budget, règlement qui comportera, le cas échéant, une hausse de la fiscalité.

La CRC constate le défaut d’équilibre réel et propose à la commune les mesures de redressement nécessaires.

Les mesures doivent être proposées dans un délai de 30 jours à compter de la saisine et la CRC peut procéder à toutes les investigations qu’elle juge appropriées.

Ces propositions sont notifiées dans un délai de trente jours au représentant de l’État et à la collectivité, qui doit les porter à la connaissance de l’assemblée délibérante.

Si la CRC ne constate pas de déséquilibre réel au sens de l’article L. 1612-5 du CGCT, la procédure s’arrête. La chambre notifie sa décision motivée au représentant de l’État et à la collectivité concernée.

Le budget est arrêté soit par l’organe délibérant, soit par le préfet dans le cadre d’un règlement d’office :

  • par la commune si, dans un délai d’un mois à partir de la communication des propositions de la CRC, celle-ci prend une nouvelle délibération comportant des mesures jugées suffisantes par la CRC. Si la CRC estime suffisantes les mesures de redressement adoptées, elle notifie au représentant de l’État ainsi qu’à la collectivité concernée un avis par lequel elle en prend acte dans les 15 jours suivant la réception de la nouvelle délibération ;
  • par le préfet qui le règle d’office à partir des propositions de la CRC, si la commune n’a pas délibéré ou si la délibération n’apporte pas de mesures de redressement jugées suffisantes par la CRC. En effet, si la CRC estime insuffisantes les mesures de redressement adoptées ou constate l’absence d’une délibération, elle notifie au représentant de l’État ainsi qu’à la collectivité concernée un avis motivé en vue du règlement du budget.

Dans ce cas, le budget est réglé et rendu exécutoire par le représentant de l’État. Ce dernier peut s'écarter des propositions de la CRC mais doit alors motiver sa décision.

La décision de règlement du budget est prise sous forme d’arrêté et doit intervenir dans les vingt jours qui suivent la notification de l’avis de la chambre.

Conséquences de la saisine de la chambre régionale des comptes

Suspension de l’exécution du budget transmis

Selon l’article L. 1612-10, la transmission du budget de la collectivité territoriale à la chambre régionale des comptes au titre des articles L. 1612-5 et L. 1612-14 a pour effet de suspendre l’exécution de ce budget jusqu’au terme de la procédure. En outre, les dépenses de la section d’investissement peuvent être engagées, liquidées et mandatées dans la limite de la moitié des crédits inscrits à ce titre.

Suspension des pouvoirs de l’assemblée délibérante

Dès la saisine de la CRC, l'article L. 1612-9 du CGCT prévoit la suspension des pouvoirs de l'assemblée délibérante en matière budgétaire jusqu'au terme de la procédure engagée.

Toute délibération budgétaire adoptée après saisine de la CRC est donc entachée d’un vice de forme et doit, de ce fait, être déférée au tribunal administratif. La saisine de la CRC sur un budget principal emporte la suspension de tout pouvoir budgétaire de la collectivité, y compris sur ses budgets annexes.

Transmission des budgets supplémentaires à la chambre régionale des comptes

Lorsque le budget primitif a été réglé d'office par le préfet, l'article L. 1612-9 du CGCT renforce le contrôle de son exécution en prévoyant la transmission du budget supplémentaire du même exercice par le préfet à la CRC.

Lorsque le budget d’une collectivité a été réglé et rendu exécutoire par le préfet, l'article L. 1612-9 du CGCT prévoit que le compte administratif doit être voté avant le budget primitif de l'exercice suivant.

Dans ce cas, les dates du 31 mars ou 15 avril fixées pour l’adoption du budget primitif sont reportées respectivement au 1er et 15 juin et le délai limite de transmission du compte de gestion par le comptable est ramené au 1er mai.

Si le compte administratif fait apparaître un déficit, ce déficit est reporté au budget primitif qui est alors transmis à la chambre régionale des comptes par le représentant de l’État.

En l'absence de vote, de transmission ou de déséquilibre du compte administratif

La procédure en cas d’absence de vote ou transmission du compte administratif

Si les dates de vote et de transmission du compte administratif ne sont pas respectées, le préfet saisit, selon la procédure prévue à l'article L. 1612-5, la CRC du plus proche budget.

Cette procédure se justifie, en cas de non adoption du compte administratif, par le caractère insincère du budget ainsi transmis :

  • s’il reprend les résultats de l’exercice précédent, il convient de s’assurer de la cohérence dans la mesure où ils n’ont pas été arrêtés par l’organe délibérant ;
  • s’il ne reprend pas les résultats de l’exercice précédent, il est insincère car il fait abstraction du passé dans la mesure où les recettes et les dépenses n’ont pas encore été arrêtées juridiquement.

En cas d’absence de transmission au préfet du compte administratif, la procédure applicable en cas d’absence d’équilibre réel du budget doit être mise en œuvre.

La CRC rend son avis : elle constate le défaut d’équilibre réel et propose à la commune les mesures de redressement nécessaires dans un délai de 30 jours à compter de la saisine.

L’arrêt du budget est réalisé soit par l’organe délibérant sous la forme d’une délibération soit par un arrêté de règlement d’office par le préfet.

La procédure en cas de déséquilibre du compte administratif

Le représentant de l’État saisit la CRC du compte administratif. Il joint à sa saisine outre le compte administratif voté, l’ensemble des informations et documents utilisés pour l’établissement de celui-ci (article R. 1612-27 du CGCT).

Il informe la collectivité ou l’établissement public intéressé de la saisine de la CRC.

  • Si l'insincérité d'une recette ou d'une dépense, au titre des réalisations ou des restes à réaliser, a pour effet de porter le déficit à un montant supérieur au seuil de 5 % ou 10 % fixé à l'article L. 1612-14 alors le représentant de l'État saisit la CRC dans les conditions de l'article L. 1612-14.
  • Si l’insincérité ne porte pas le déficit au-delà du seuil ou ne déséquilibre pas le résultat, alors le représentant de l'État peut saisir le juge administratif sur la base de l'illégalité.
  • Si le compte administratif présente un déficit égal ou supérieur au seuil de 5 % ou 10 % fixé à l'article L. 1612-14.

Examen et correction des budgets à partir du compte administratif par la CRC

En cas de saisine de la CRC sur le compte administratif, celle-ci propose à la collectivité, dans un délai d'un mois, les mesures nécessaires au rétablissement de l'équilibre qui peuvent intervenir soit dans le cadre du budget supplémentaire soit plus vraisemblablement dans le cadre du budget primitif de l'exercice suivant.

Les propositions de la CRC ne portent jamais sur la réformation du compte administratif lui-même, mais sur l'équilibre du budget en cours ou du budget suivant, qui doit nécessairement en reprendre les résultats.

Transmission obligatoire du budget primitif de l’exercice suivant à la CRC

Le budget primitif de l'exercice suivant est lui-même transmis obligatoirement à la CRC. Si lors de son examen, la CRC constate que la commune n'a pas pris de mesures suffisantes pour résorber le déficit, elle propose les mesures nécessaires au préfet dans un délai d'un mois à partir de la transmission précitée.

L'application de cette procédure n'est pas cumulable avec une saisine de la CRC pour déséquilibre au titre de l'article L. 1612-5.

Règlement d’office du budget par le préfet

Le préfet règle le budget et le rend exécutoire, après application éventuelle, en ce qui concerne les communes, des dispositions de l’article L. 2335-2 du CGCT. S’il s’écarte des propositions formulées par la CRC, il assortit sa décision d’une motivation explicite.

La procédure en cas de rejet du compte administratif

Le troisième alinéa de l’article L. 1612-12 du CGCT prévoit une procédure particulière en cas de rejet du compte administratif par l’organe délibérant :

  • le représentant de l’État constate le rejet du compte administratif par délibération de l’organe délibérant accompagnée du projet de compte administratif rejeté ;
  • le représentant de l’État saisit sans délai la CRC du compte administratif rejeté ;
  • il joint à sa saisine le compte administratif rejeté accompagné de la délibération de rejet et du compte de gestion établi par le comptable.

La CRC formule dans un délai d’un mois un avis sur la conformité du projet de compte administratif au compte de gestion.

L’avis de la CRC entraîne les conséquences suivantes :

  • soit la CRC constate la conformité des deux documents, le compte administratif rejeté est validé pour la liquidation des dotations de l’Etat et des prélèvements à effectuer visés au troisième alinéa de l’article L. 1612-12 ;
  • soit la CRC rend un avis de non-conformité du compte administratif avec le compte de gestion, la substitution ne peut alors s’opérer.

Les effets de la saisine de la CRC                         

Suspension de l’exécution du budget transmis

Dans les trois cas de saisine de la CRC (absence, déficit et rejet du compte administratif), le plus proche budget suivant le compte administratif est déféré à la CRC.

Selon l’article L. 1612-10, la transmission du budget de la collectivité territoriale à la chambre régionale des comptes au titre des articles L. 1612-5 (absence et rejet du compte administratif) et L. 1612-14 (déficit du compte administratif) a pour effet de suspendre l’exécution de ce budget jusqu’au terme de la procédure.

Suspension des pouvoirs de l’assemblée délibérante

Dès la saisine de la CRC, les pouvoirs de l'assemblée délibérante en matière budgétaire sont suspendus jusqu'au terme des procédures engagées.

En cas de déficit du compte administratif, l’article L. 1612-14 implique la suspension des pouvoirs budgétaires de l’organe délibérant. Il revient en effet au représentant de l’État de régler et rendre exécutoire le budget le plus proche.

 

Appréciation du déficit du compte administratif et mouvements financiers entre budget annexe et budget principal (article L. 1612-14 du CGCT)

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